Les dessous du Décret Tertiaire - Partie 2

24/01/2022

Dans la lignée de la loi ELAN, associés au Décret BACS[1], le Décret Tertiaire et ses arrêtés fixent des objectifs environnementaux louables et ambitieux pour réduire les consommations d’énergie dans la durée. L’article précédent (Les dessous du Décret Tertiaire – Partie 1) faisait l’état des lieux des acteurs concernés, des objectifs à atteindre et des méthodes de calcul existantes. Une fois rentrés dans le détail de ses applications, beaucoup d’entre nous s’interrogent sur de possibles interprétations. Parallèlement, les textes incitent fortement à la mise en place de systèmes digitaux dédiés au pilotage et au suivi des consommations.

 

Une mutualisation des résultats est prévue par le Décret Tertiaire.

En effet, le maître d’ouvrage n’a pas obligation de respecter les objectifs pour chacun de ses sites pris individuellement, mais bien sur l’ensemble de son périmètre patrimonial assujetti au décret. Cela permet de faire porter davantage d’effort sur des sites qui en ont le potentiel et de compenser ainsi la sous-performance éventuelle d’autres sites, particulièrement ceux dont les spécificités ne permettraient pas une atteinte complète des objectifs. Il convient donc, une fois le calcul réalisé pour chacun de vos sites, de regarder l’effort énergétique déjà parcouru et restant à réaliser. Et ce sur la globalité du patrimoine concerné.

Le décret autorise des modulations de ces objectifs.

Il ne s’agit pas de dérogations, mais d’une prise en compte des contextes particuliers qui nécessiteraient de s’affranchir d’objectifs inatteignables. Cet abaissement des objectifs de réduction des consommations sera possible en cas de contraintes patrimoniales fortes. D’une part, celles liées à la qualité architecturale ou à la pathologie du bâtiment. D’autre part, dans le cas où les temps de retour sur investissements sont trop importants (plus de 30 ans sur l’enveloppe, 15 ans pour les travaux de renouvellement des équipements énergétiques, 6 ans pour les systèmes d’optimisation et d’exploitation visant la gestion, la régulation, et l’optimisation en exploitation). Néanmoins, dans le cas où le site serait soumis à de fortes contraintes esthétiques et architecturales, la priorité sera donnée aux solutions automatisées de gestion et de régulation de l’énergie. Enfin, même si le détail de calcul de ces modulations[7] reste encore à préciser, elles devront trouver leurs justifications sur la base d’audits indépendants, réalisés par des professionnels habilités.

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Le calendrier des actions

Le calendrier des actions est rythmé par le développement de la plateforme OPERAT, proposée par l’ADEME pour la collecte des données à l’échelle nationale. La saisie des données patrimoniales devrait y être possible à compter de décembre 2021. Quant aux données de consommations, elles devront y être déclarées pour le 30 septembre 2022. Pour les assujettis, l’année 2022 est une année d’apprentissage. Pour cette raison, et pour laisser le temps de déclarer les consommations convenablement, une tolérance pour le remplissage de ces déclarations est accordée jusqu’au 31 décembre 2022. Ainsi, il est possible d’effectuer de nouvelles déclarations et de modifier autant de fois que nécessaire les déclarations déjà réalisées, jusqu’à la fin de l’année 2022.

S’ensuivra alors une phase de suivi périodique des objectifs. On voit dès lors tout l’intérêt pour le maître d’ouvrage de disposer d’un système automatisé de collecte et de monitoring de ses consommations, et ce à l’échelle de l’ensemble des sites assujettis. En l’absence d’un tel système, le propriétaire de bâtiments tertiaires sera contraint d’organiser manuellement la collecte des données de consommations sur plusieurs décennies et de justifier le prorata des usages énergétiques, en particulier pour suivre les consommations de chauffage et de climatisation.

Le Décret BACS

Et le Décret BACS dans tout ça ? Il impose la mise en place de systèmes de contrôle et d’automatisation. Il concerne, d’ici janvier 2025, les bâtiments dont les systèmes de chauffage et de climatisation ont une puissance supérieure à 290 kW et à partir de janvier 2027, ceux qui ont une puissance supérieure à 70 kW. A titre de comparaison, cette puissance correspond à celle d’un camion standard. Le système numérique à implémenter devra à la fois permettre de suivre, d’enregistrer et d’analyser les données de consommations énergétiques. La réponse consiste donc à instrumenter les bâtiments et à les connecter à un outil logiciel adapté.

Ce qu’il ressort de ces différents textes de loi, arrêtés et décrets d’application, c’est une convergence forte en faveur des systèmes digitaux dédiés à l’instrumentation et à la gestion des bâtiments. L’enjeu repose tout d’abord sur la collecte des données de consommations, ensuite sur leur suivi durant les décennies à venir, enfin sur la maîtrise en temps réel des dépenses énergétiques. Les outils digitaux déployés devront ainsi permettre de visualiser et d’analyser les dépenses énergétiques pour les différents usages. Leur implémentation fait appel à l’intégration de comptages intelligents et communicants et repose sur des composants de régulation et de l’IoT[4]. Une fois reliés à des plateformes logicielles SAAS[5] munies de modules de visualisations et d’alertes, ces composants permettent de répondre aux exigences techniques et réglementaires actuelles et à venir. Au-delà des travaux de rénovation, le Décret Tertiaire et le Décret BACS constituent un axe stratégique majeur dans la maîtrise des consommations en phase d’exploitation des ouvrages basée sur la GTEB[6] et les solutions digitales.

Si de nouvelles questions relatives au Décret Tertiaire persistent, les équipes de CYRISEA se rendent disponibles pour pouvoir y répondre.